Discours de réponse à la motion de censure socialiste.

Madame la Présidente,

Monsieur le Premier ministre,

Mesdames et Messieurs les ministres

Chers collègues, 

Nous voici une fois de plus réunis dans cet hémicycle pour débattre d’une motion de censure. Une motion qui n’a d’autre ambition que celle d’occuper l’espace médiatique.

Vous reprochez au Premier ministre deux mots. Vous vous indignez de l’emploi du terme de « submersion migratoire ». Si votre démarche était sincère, vous auriez repris non pas deux, mais quatre mots employés par le Premier ministre : « sentiment de submersion migratoire ».

Et cela change tout. Dans un cas cela peut justifier votre motion de censure ; dans le second, ça vous discrédite. Mais qu’importe.

Vous nous donnez l’occasion de rappeler les incohérences et les renoncements auxquels les bancs de la gauche consentent depuis de trop nombreuses années sur une matière aussi profondément humaine que notre rapport à l’immigration. 

Ce sentiment de submersion, qui pourrait contester qu’il soit ressenti par de nombreux compatriotes, à Mayotte et dans tant d’autres territoires de France ? 

Nous ne pouvons plus ignorer le sentiment des Français, comme nous ne devons plus ignorer les faits.

Souvenons-nous des propos d’Ernest Renan, à l’heure où étaient jetées les fondations républicaines : « Une nation est une âme, un principe spirituel, une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement […] La nation est un plébiscite de tous les jours. »

Sept ans après, en 1889, la République adoptait une loi sur la nationalité qui consacrait le double jus soli, le double droit du sol.

Ignorer le sentiment des Français, c’est ignorer cette faculté à consentir ou à ne pas consentir au projet national, à poursuivre ou à rompre ce « plébiscite de tous les jours ». C’est ignorer aussi ce passé, celui dans lequel nos racines puisent profondément. Nul besoin que ces racines soient identiques pour former une Nation ; il suffit que l’enracinement soit plébiscité lui aussi.

*****

Nous le disons ici, avec gravité mais sans ambiguïté : la France doit remettre de l’ordre dans sa politique migratoire. C’est une nécessité, et c’est un devoir, auquel le Groupe Horizons & Indépendants, travaillera pour apporter des solutions.

Nous devons remettre de l’ordre dans notre politique migratoire, car il en va des fondements de la Nation. Quels sont-ils ? L’adhésion à un projet commun et la volonté de participer à un effort permanent de construction.

Je déplore que ces valeurs soient aujourd’hui oubliées d’une trop large partie de la gauche républicaine. Elles étaient pourtant l’une des pages les plus nobles de son Histoire.

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Une politique réussie de l’immigration repose sur trois piliers : la maîtrise des flux, la lutte contre l’immigration clandestine et l’intégration des immigrés réguliers.


En matière de flux, pour la seule immigration légale, la Cour des comptes nous indique dans un rapport récent que près de 327 000 titres de séjours ont été accordés en 2023, soit une hausse de 64% en dix ans. La même année, plus de 140 000 demandes d’asile ont été déposées. Cela représente donc près d’un demi-million de personnes par an, qui viennent s’ajouter aux 4 millions de titres de séjour en cours de validité. 

Les faits sont têtus : la hausse des flux correspond à une multiplication par trois du nombre d’entrées sur le territoire national depuis le début des années 2000.

A ces chiffres s’ajoutent une estimation basse d’au moins 600 000 personnes supplémentaires qui se trouvent actuellement en situation irrégulière en France.

En matière de lutte contre l’immigration clandestine, les faits sont têtus aussi. En 2023 sur 138 000 mesures d’éloignement prononcées par la France, seules 7% ont été exécutées.

L’intégration, ou l’assimilation, selon les nuances qu’on souhaite lui apporter, est enfin l’élément sur lequel repose le pacte républicain. Elle suppose en effet une adhésion préalable et indispensable ; elle est aussi la condition de notre indivisibilité, celle de la République et de la Nation.

Fustel de Coulanges, dans une période cruciale qui a façonné notre pays, dans les années 1870, nous rappelle, à juste titre, que « La patrie, c’est ce qu’on aime ». Pour Albert Camus, la patrie c’est la langue française. Au fond, ils disent la même chose.

Du baron Haussmann à Marie Curie, en passant par Henri Bergson, Guillaume Apollinaire, Romain Gary ou Joseph Kessel, combien de grands étrangers devenus Français nous l’ont démontré avec autant de cœur que de brio, chacun dans son domaine ?

Ces femmes et ces hommes ont tous eu pour boussole l’idéal français de la Liberté, au cœur de leurs choix les plus intimes et souvent les plus douloureux.

Nous ne devons pas trahir cette espérance. Nous devons résolument refuser de renoncer à l’idéal de Liberté lorsqu’on parle d’immigration. Il devrait d’ailleurs être partagé sur chacun des bancs de cette Assemblée.

Aujourd’hui d’autres grands contemporains nous le rappellent, à l’image de Boualem Sansal, et de sa plume, emprisonnés par le pouvoir algérien.

Pour ne pas renoncer à cet idéal de Liberté et d’intégration, il n’y a pas cinquante solutions. Nous devons maîtriser les deux autres axes : les flux et la lutte contre l’immigration clandestine.

Cela passe, d’une part, par une coopération internationale éclairée, par une lutte contre les réseaux de passeurs et de trafiquants, ainsi que par notre capacité à discuter et à renégocier avec fermeté les accords qui aujourd’hui nous contraignent injustement.

Le régime spécifique dont l’Algérie bénéficie depuis 1968 trouvait sa justification il y a soixante ans. Aujourd’hui, il doit être suspendu face au refus croissant des autorités algériennes de coopérer. Il est possible de le faire, sous votre autorité, Monsieur le Premier ministre. Aucun travail législatif n’est nécessaire pour engager immédiatement cette suspension de l’accord de 1968 entre la France et l’Algérie.

De même, l’accord du Touquet de 2004 doit pouvoir être réinterrogé. Est-il légitime, plus de vingt ans après son entrée en vigueur, de continuer à faire peser les enjeux de sécurisation de la frontière britannique sur nos côtes françaises et sur les populations locales ?

D’autre part, la maîtrise des flux légaux ne doit plus être un tabou, ni un étendard politique. La circulaire prise récemment par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, portant sur les pouvoirs de régularisation exceptionnelle des préfets, embrasse une direction que nous saluons.

L’admission au séjour et l’intégration dans la nationalité ne doit pas relever d’un fait d’opportunité, mais d’une volonté ferme du législateur.


La question des naturalisations par la voie des mariages doit aussi être posée. La polémique née du refus du maire de Béziers de marier un étranger placé sous OQTF renforce notre conviction : le mariage ne peut pas être une voie de contournement de la règle commune ou de l’autorité de l’État.

Enfin, nous devons redonner confiance aux Français, et aussi aux étrangers qui aspirent à le devenir par la voie légale. Redonner confiance dans la capacité de l’État à protéger, à accompagner, à intégrer. Redonner confiance dans notre pacte républicain, dans nos valeurs et dans notre idéal de liberté.

*****

Cette motion de censure ne fait qu’ajouter de la confusion à un débat déjà complexe. Elle ne propose aucune solution concrète, aucune piste de réflexion sérieuse.

Il nous appartient au contraire de fixer un cap. La France a besoin d’unité, de cohésion et de solidarité pour affronter les défis de l’immigration.

Avec mes collègues du groupe Horizons & Indépendants, nous y sommes prêts. Nous croyons en une politique qui propose, qui construit, qui avance, qui rend libre. Nous croyons en une politique qui entend les Français lorsqu’ils expriment leurs sentiments, qui les respecte et qui leur apporte des solutions ; et non des gesticulations.

Monsieur le Premier ministre, le groupe Horizons & Indépendants est attaché aux trois fondements d’une politique d’immigration maîtrisée : contrôle des flux, lutte contre l’immigration clandestine et intégration des immigrés réguliers dans la construction de la Nation, cette « âme des peuples » qui nous est si chère.

Notre groupe est disposé à travailler avec vous, Monsieur le Premier ministre, sur ces trois fondements.

C’est la raison pour laquelle nous ne voterons pas cette motion de censure.

Je vous remercie.

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