Discours de réponse à la Déclaration de politique générale du Premier ministre

Discours prononcé par à la Tribune de l’Assemblée nationale par le député Sylvain BERRIOS, au nom du groupe Horizons & Indépendants, en réponse à la déclaration de politique générale du Premier ministre le 14 janvier 2025

Madame la Présidente,

Monsieur le Premier ministre,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Mesdames et messieurs les députés, chers collègues,

Le 5 décembre dernier, les députés, issus notamment du Rassemblement National et des groupes qui composent le Nouveau Front Populaire, ont fait le choix de s’allier pour censurer le Gouvernement, ouvrant la voie à une instabilité jamais connue dans l’histoire de la Vème République.

Personne n’a gagné les élections, Il n’y a pas de majorité établie, c’est un fait.

Nous pouvons toujours continuer à nous regarder en chiens de faïence et feindre d’ignorer les conséquences désastreuses du choix de l’instabilité.

Les députés du groupe Horizons & Indépendants ont fait un autre choix, celui de la responsabilité, en veillant aux intérêts du pays avant de veiller aux intérêts des coteries.

« L’unité, la cohésion, la discipline intérieure du gouvernement de la France doivent être des choses sacrées, sous peine de voir rapidement la direction même du pays impuissante et disqualifiée ». Par ces mots, lors du discours fondateur de Bayeux en 1946, le Général de Gaulle montre le chemin existentiel qu’il nous faut suivre.

La direction du pays est une chose sacrée car, aussi étonnant que cela puisse paraitre, les jeux d’alliances au Parlement français n’intéressent pas la Russie qui poursuit sa guerre contre l’Ukraine. Cela n’intéresse pas plus Donald Trump et ses velléités de reléguer l’Europe au rang de supplétif. A vrai dire, cela n’intéresse pas non plus la Chine qui intensifie ses pressions commerciales tous azimuts. Probablement encore moins, les acteurs régionaux du Levant, qui traverse en ce moment des bouleversements profonds. En revanche, cela intéresse la Présidente de la Commission européenne qui, grâce aux députés censeurs, trouve une occasion inespérée d’accélérer l’accord avec le Mercosur.

Alors, en ce début d’année, les députés du groupe Horizons & Indépendants forment le vœu que nous trouvions le courage collectif de sortir des querelles pour enfin parler aux Français des moyens à mettre en place pour résoudre leurs problèmes.

Car si beaucoup de nos concitoyens ne savent pas ce qu’est une commission mixte paritaire, ils savent en revanche tous que les plans sociaux se multiplient. Ils sont nombreux à vouloir que l’accès à la santé ne soit plus un chemin de croix. A attendre que leur travail leur permette de retrouver un pouvoir d’achat à la hauteur de leurs efforts. A se demander si la crise du logement aura une fin. A être inquiets de l’insécurité du quotidien, anxieux de la gangrène du narcotrafic et soucieux d’une immigration subie.

Pour pouvoir agir, nous avons besoin d’un budget.

Saluons à cette occasion le travail de votre prédécesseur, Michel BARNIER, car il a posé des constats clairvoyants, dont la censure du 5 décembre ne nous exonèrera pas. La France ne peut plus se payer le luxe de creuser davantage son déficit. L’accroissement indéfini de la dette est un poison.

A cet égard, le débat sur les retraites est éclairant. Seule une réforme systémique, à l’instar de celle proposée en 2019 autour d’un mécanisme de points, pourrait nous permettre de sortir de l’ornière. Imaginer en revanche, qu’un système de retraite par répartition soit viable en revenant à la retraite à 62 ou 60 ans procède de l’aveuglement.

Nous avons bien noté la convocation d’une conférence sociale. Nous sommes bien sûr favorables à la discussion, avec chacune et chacun, y compris avec les députés de votre majorité… Nous devons regarder la réalité en face. Perdre du temps, revenir en arrière ne fera qu’accélérer la crise financière et budgétaire.

De même, alors que notre pays possède les taux d’imposition parmi les plus élevés au monde, nous ne pourrons pas accepter la création d’impôts nouveaux.

Pour assainir nos comptes publics et retrouver des marges de manœuvres, nous devons donc travailler à une baisse significative de la dépense publique et agir sur la structure même de l’État.

Je salue pour cela la présence à vos côtés, Monsieur le Premier ministre, de Laurent MARCANGELI qui saura, j’en suis sûr, porter le défi de la simplification et de l’efficacité de l’action publique au cœur des choix budgétaires. Chaque euro investi doit répondre à cet impératif d’efficacité.

Monsieur le Premier Ministre, votre ambition de simplifier et de réformer l’Etat est une urgente nécessité. Prenons un exemple : la politique environnementale est essentielle. Et pourtant, qui peut aujourd’hui comprendre qu’elle soit écartelée dans un tel éparpillement d’instances ? ADEME, commissariat général au développement durable, agence de l’environnement, comité interministériel, comité national de la biodiversité, de la transition écologique, de la protection de la nature, Haut conseil pour le climat … Et j’en oublie !

De même, quelle crédibilité les Français peuvent-ils encore trouver dans notre millefeuille administratif, où plus personne ne sait qui prend une décision et quand ?

En Île-de-France, en moins de 10 ans, nous avons réussi l’exploit de créer 2 nouvelles strates politico-administratives s’ajoutant aux 3 existantes, dans un enchevêtrement invraisemblable de compétences !

Pour autant, les collectivités locales ne sont pas à l’origine du désastre budgétaire. Elles portent 70% des investissements publics et leurs comptes sont à l’équilibre. Elles sont aussi – et souvent surtout – les seuls guichets accessibles de la République.

Les élus locaux sont disposés à participer à l’effort collectif de redressement des finances publiques, mais pas au prix de tous les sacrifices. Pour cela nous devons rebâtir avec les collectivités une relation contractuelle de confiance, reposant sur la simplification des normes qui leur sont imposées, sur un nouvel acte de décentralisation et de déconcentration et sur le respect de leur autonomie financière.

Mais, l’effort budgétaire demandé aux collectivités ne peut pas être supérieur à celui de l’État.

Mais votre gouvernement, Monsieur le Premier ministre, devra prioritairement répondre aux préoccupations urgentes et immédiates des Français. L’urgence tout d’abord : Le projet de loi d’urgence pour Mayotte, dont l’examen en cours en ce moment dans notre Assemblée devra être complété par des mesures budgétaires fortes. De même, le budget devra permettre d’apporter des solutions politiques et économiques à la Nouvelle Calédonie.

Des préoccupations immédiates telles que : le coût de l’énergie qui est une inquiétude pour nos entreprises les poussant à faire des choix stratégiques et cornéliens.

Le logement : l’élargissement du prêt à taux zéro, que porte le groupe Horizons & Indépendants, est attendu par des milliers d’acquéreurs. La mesure pour faciliter les donations et successions en vue d’un premier achat, que nous proposons, donnerait une bouffée d’oxygène à un secteur qui en a cruellement besoin. Nous devons aussi sortir notre pays du fétichisme du quota en matière de logements aidés pour mieux accompagner les élus et desserrer le carcan administratif qui pèse sur le secteur de la construction.

L’agriculture : ces femmes et ces hommes qui ne comptent pas leurs heures pour assurer à notre pays une souveraineté alimentaire respectueuse de l’environnement et de qualité, veulent juste l’application des mesures qui leur étaient promises.

Parmi nos priorités, certains chantiers nécessitent une vision et des engagements de long terme. Je pense en particulier aux lois de programmation des ministères de l’Intérieur et de la Justice. Les Français attendent des actes forts, en particulier dans la lutte contre le narcotrafic et la délinquance du quotidien. Nous souhaitons que votre gouvernement réussisse à relever ce défi avec Gérald DARMANIN et Bruno RETAILLEAU.

L’immigration ne doit plus être un sujet tabou. Notre relation avec l’Algérie doit être remise à plat, comme le proposait Edouard PHILIPPE dès juin 2023. Nous n’avons aucune raison de supporter menaces et chantages sur une matière aussi profondément humaine que l’immigration.

Tant que cette relation ne sera pas refondée, il nous faut suspendre les accords de 1968. De la même manière, les accords du Touquet de 2003 doivent être réinterrogés.

En matière environnementale, notre action ne peut se contenter de la seule poursuite de l’objectif, nécessaire mais insuffisant, de réduction des émissions de gaz à effets de serre. La sauvegarde et le développement de la biodiversité doivent aussi être ambitieux et se conjuguer avec la protection de nos terres, nos rivières, nos fleuves. C’est ainsi qu’une politique environnementale peut trouver son lien charnel avec le pays.

Il nous faut aussi poursuivre le travail engagé en matière de solidarité, d’insertion et de handicap, dont le périmètre a su être préservé dans le dernier projet de budget grâce à l’action de Paul CHRISTOPHE et de Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK, que nous tenons à saluer, et à Charlotte PARMENTIER-LECOQ qui continuera à œuvrer au gouvernement.

D’autres défis nous attendent dans le domaine de l’école, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Au moment où le pouvoir de l’intelligence humaine dessinera notre avenir face aux révolutions numériques et à la montée de l’intelligence artificielle, la loi de programmation pour la recherche doit être menée à son terme.

En dernier lieu, dans les prochains mois, notre pays aura à affronter le monde tel qu’il a l’inconvénient d’être. La souveraineté de la France dans le monde doit être réaffirmée. Notre diplomatie a été mise à rude épreuve., de même que nos armées. Alors que l’arc des crises internationales se développe, la mise en œuvre de la loi de programmation militaire est indispensable, et nous savons pouvoir compter sur Sébastien LECORNU pour y veiller.

Pour conclure, Monsieur le Premier ministre, permettez-moi de rappeler notre attachement aux institutions de la Vème République. Dans la situation critique que traverse notre pays, tant sur le plan politique qu’économique, il faut se garder d’essayer de trouver des solutions simplistes à des équations complexes.

Confisquer le lien charnel qui existe entre les élus et les Français au profit d’un scrutin proportionnel au bénéfice exclusif des partis n’est pas une réponse à une crise de régime qui trouve sa source dans le chaos et de ceux qui veulent le chaos.

Les Français n’ont que faire des états d’âme de ceux qui bloquent l’action gouvernementale. Ils veulent des solutions. Et ils ont raison.

Chacun ici doit admettre que nous n’aurons pas de deuxième chance, et que le pays nous regarde avec une juste exigence.

Dans ce contexte vous pouvez donc compter, Monsieur le Premier ministre, sur le groupe Horizons & Indépendants pour apporter à votre action un soutien exigeant et vigilant.

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